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Page:Mélesville et Carmouche - La permission de dix heures.pdf/9

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NICOLE.

Je crois bien ! Outre cette campagne, elle a sa belle boutique de passementerie de la rue des Bourdonnais !

LAROSE.

Et quel âge a-t-elle, m’ame votre tante ?

NICOLE.

Dame ! quand elle m’a prise chez elle, elle avais vingt-trois ans… ; mais, c’est drôle, depuis deux ans que j’y suis, elle n’en a plus que vingt et un !

LAROSE.

C’est qu’elle va dans un autre sens ! Nous en avons beaucoup de femmes qui ont cette manière de marcher.

NICOLE.

C’est égal ! elle ne consentira à me donner un mari que quand elle aura le sien. (Pleurant.) Ah ! c’est fini ! Je resterai fille toute ma vie.

LAROSE, vivement.

Je m’y oppose, mille mousquets ! Non ! non ! tu m’obtiendras, ô mon infante !… Je vais marier m’ame Jobin en vingt-quatre heures !

NICOLE.

Marier ma tante ? Comment ?

LAROSE.

Je n’en sais rien.

NICOLE.

Et à qui ?

LAROSE.

Je l’ignore ! Elle l’épousera ou le diable m’étrangle ! Venez seulement ce soir… par ici… pour prendre le mot d’ordre.

NICOLE.

Je ne peux pas… le petit notaire bossu, M. Daufort, vient souper.

LAROSE.

Raison de plus : entre la poire et le fromage, on feint d’aller se jeter dans les bras d’Orphée, et on accourt dans ceux d’un amant