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Page:Ménard - Rêveries d’un païen mystique, 1911.djvu/243

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LA DERNIÈRE NUIT DE JULIEN



JULIEN



Par-dessus tous les Dieux du ciel et de la terre
J’adore ton pouvoir immuable indompté,
Déesse des vieux jours, morne Fatalité.
Ce pouvoir implacable, aveugle et solitaire
Écrase mon orgueil et ma force, et je vois
Que l’on décline en vain tes inflexibles lois.

Les peuples adoraient le joug qui les enchaîne,
Rome dormait en paix sur son char triomphal,
Des oracles veillaient sur son sommeil royal.
Maintenant, du Destin la force souveraine
Brise le sceptre d’or de Rome dans mes mains,
Et Sapor va venger les Francs et les Germains.

J’ai relevé l’autel des Dieux de la Patrie,
Et j’aperçois déjà le temps qui foule aux pieds
Les vieux temples déserts de mes Dieux oubliés.
Au culte du passé j’ai dévoué ma vie.
Bientôt sous sa ruine il va m’ensevelir.
Le passé meurt en moi, victoire à l’avenir !