Aller au contenu

Page:Mérimée - Colomba et autres contes et nouvelles.djvu/389

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Le comte, de même. Il serait peut-être convenable de remettre tout après son départ…

La comtesse. Allez, vous dis-je, je réponds de lui.

(Le comte sort.)

Scène V.

ÉDOUARD, LA COMTESSE.

Édouard, assis et mangeant. Que diable avez-vous à vous dire tout bas ? Avez-vous des secrets pour moi, ou bien est-ce que je vous gêne ?

La comtesse. Au contraire, Édouard, nous sommes enchantés de vous revoir. Je vous expliquerai plus tard ce que disait M. des Tournelles. Il paraît que vous avez toujours bon appétit.

Édouard. Au régiment, j’ai appris à manger vite ; en garnison, en Allemagne, j’ai appris à manger longtemps ; de sorte que maintenant je mange vite et longtemps. Et puis, savez-vous que j’ai fait douze lieues ce matin, sur un bidet de poste, pour vous voir plus tôt… Mais j’oubliais qu’il est impoli d’avoir de l’appétit quand on est auprès d’une jolie femme… (Il éloigne le pâté en soupirant.) J’ai fini.

La comtesse. Eh bien ! vous feriez des façons avec nous ! Continuez donc ; seulement arrangez-vous pour faire honneur au dîner. (Elle lui verse à boire.) Comment trouvez-vous ce vin ?

Édouard. Délicieux ! surtout parce que c’est vous qui me l’avez versé.

La comtesse. C’est au régiment que vous avez appris à dire ces jolies choses-là ?

Édouard. Tenez, cousine, versez encore. Au régiment, voyez-vous, nous apprenons à dire la vérité toute crue et sans phrases. Et, à propos de cela, vous êtes charmante,