Page:Méry - La guerre du Nizam, Hachette, 1859.djvu/106

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celle d’Edward, et l’on aurait vainement cherché sur toute sa personne la trace de la griffe d’un Taug ; mais sa figure était empreinte d’une horrible pâleur.

Edward courut à lui.

« Venez donc, cher Douglas, lui dit-il ; votre retard est une imprudence sans pardon. Pour distraire miss Arinda de ses réflexions, j’ai mis l’entretien sur le mariage : c’est la seule conversation qui amuse les femmes des deux hémisphères et leur fait tout oublier, même leurs maris. Mais un quart d’heure de plus…

— Edward, dit le colonel, heureux les braves qui sont morts cette nuit en faisant leur devoir !

— Heureux ceux qui vivent, cher Douglas ! Si la mort est un bonheur, c’est le seul qui soit toujours à notre disposition.

— Heureux les morts ! vous dis-je, cher Edward !… Laissez-moi mettre un masque serein sur ma figure de deuil… Il faut que j’aborde le nabab et sa fille… Vous, Edward, retirez-vous à l’écart… cherchez un coin de forêt bien sombre, et lisez cette lettre, sans témoin… Je vous attends. »

Edward prit la lettre, la roula dans ses mains, et s’achemina lentement vers le bois qui s’étendait derrière l’habitation. Nous allons lire ce qu’il lut.

La comtesse Octavie au colonel Douglas.

Vous recevrez, mon cher colonel, dans le même pli, ma lettre et la lettre du ministre : elles s’expliquent mutuellement.

Vous avez rompu violemment votre mariage avec Amalia ; vous avez fait une chose sans exemple dans l’histoire des mariages ; vous avez cru mettre votre conscience à l’abri de tout reproche, en sauvegardant les intérêts d’une jeune fille, comme dit le tuteur ; vous