Page:Méry - La guerre du Nizam, Hachette, 1859.djvu/12

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dente, semblait contenue par une réserve et un maintien diplomatiques.

— Ah ! vous, c’est différent, monsieur Edgard de Bagnerie ! je ne veux pas être dupe de votre générosité. Vous visez à une ambassade, et chaque bal où vous figurez est dénoncé à votre chancellerie, comme un crime de lèse-gravité ; un avant-deux vous fait reculer d’un an sur la route des ambassadeurs… Et vous, comte Élona Brodzinski ; serez-vous généreux comme ces messieurs ?

— Excusez-moi, madame, dit le jeune comte polonais, j’ai le malheur de ne pouvoir rien vous sacrifier en ce moment.

— Au fait, c’est juste ! dit la comtesse en souriant ; nous avons trouvé M. le comte Élona ici, en contemplation devant la mer ; il ne cherche pas le bal : c’est le bal qui est venu le chercher.

— Me permettez-vous de vous interroger, madame ? » dit le comte Élona en faisant quelques pas vers la comtesse.

La jeune femme fit de la tête un signe de consentement, et le proscrit polonais continua de la sorte :

« Vous habitez Smyrne depuis plusieurs années ?…

— Depuis la mort du comte de Verzon, mon mari,… depuis quatre ans.

— Excusez encore mon indiscrétion, madame ; vous habitez toujours, dans la belle saison, une maison de campagne voisine du pont des Caravanes ?

— Oui, comte Élona, une maison que j’aime beaucoup, et que je vendrai l’hiver prochain, en versant des larmes sur le contrat.

— Comment ! vous vendez ce bijou d’émeraudes ! s’écria le jeune Edgard de Bagnerie. Attendez au moins mon consulat ; je l’achèterai.