Page:Méry - La guerre du Nizam, Hachette, 1859.djvu/56

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tion. Ce signe formé par tout le corps était traduit par cette phrase : « Nizam, qu’y a-t-il de nouveau ? »

Nizam, les yeux tournés vers les danseurs, poussa un grand éclat de rire qui signifiait pour sir Edward que l’heure était sérieuse et menaçante ; et tout à coup, le serviteur indien mit sa main droite en auvent sur ses paupières, pour se donner un prétexte naturel de jeter un regard au soleil qui l’incommodait dans ses plaisirs de spectateur, et ce regard, retombé sur la terre, embrassa rapidement la foule, la place, la fête et rebondit à l’horizon des montagnes et du désert.

Edward battit des mains sous l’estrade des danseurs, avec une figure pleine de surprise et de gaieté. L’entretien venait de s’épuiser en moins d’une minute ; tout était compris.

Des Indiens hideux et sombres, des fakirs à faces de mandrilles, des spectres nus et chauves, tatoués de blanc sur un visage de laiton, passaient et repassaient avec des ondulations convulsives et des râles sourds et stridents. Le signe tranquille tombé du visage serein d’Edward demandait à Nizam : « Est-ce un Taug, celui-ci ?

— Oui, répondait Nizam, courbé par un enthousiasme menteur devant les danses indiennes.

— Et celui-ci ? poursuivait Edward.

— Oui.

— Ce batteur de riz ?

— Oui.

— Ce joueur de sitar ?

— Oui.

— Ce fakir ?

— Oui. »

Sir Edward croisait les bras et inclinait sa tête ; tout son corps, moins sa bouche, disait à Nizam : « Voilà une belle collection de Taugs ! »