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Page:Machaut - Le Voir Dit, 1875.djvu/119

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[vers 1416]
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DU VOIR-DIT.

Que devers li ſi toſt alaſſe ;[1]
Si voloit que me confortaſſe
Et que j’éuſſe remembrance
De ſa tres-douce contenance.

Ainſi eus l’ymage de pris,
Que j’aim ſur toute rien & pris,
Après ma dame debonnaire
Qui ſur toutes eſt de bon aire.
Mais ſans doubte ains que je l’éuſſe,
Il convint que j’en recéuſſe
Mainte friſſon, mainte doleur,
Et que j’éuſſe la couleur
Souvente fois tainte & deſtainte,
Et féyſſe mainte complainte.
Car cils que aimme par amours
A des joies & des clamours,
Des grans deſirs & des penſées
Diverſement entremellées ;
Et ſouvent ne ſcet qui li faut,
Et mainte fois a grant deffaut
De ce dont il a grant plenté.
Or eſt malades en ſanté,
Or ha pais, or fait chiere lie,
Or eſt en grant merencolie ;
C’eſt des amoureus la couſtume :
Qui bien aime à ce s’acouſtume.
Si ſui en ce point longement,
Or en léeſce, or en tourment.
Car une dame ainſi demaine

  1. Comme s’il y avoit : « Ainſi pouvoit-il arriver que je n’alaſſe ſi tôt vers elle. »