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Page:Machaut - Le Voir Dit, 1875.djvu/308

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[vers 5830]
LE LIVRE

Ainſi vos noms qui en mains lieus s’eſpart,
Le bien de luy à pluſeurs gens depart,
Et fait ſouvent .i. hardi d’un couart,
Et un ſage home & raſſis, d’un coquart,
Et les mauvais amender par ſon art,
À l’aïde de voſtre dous regart
Qui eſt ſans blaſme.

Ne fu vaillans Lancelos pour ſa dame,[1]
Triſtans, Paris & Percevaus qui ame
Ne congnoiſſoient de bien ? oïl, par m’ame !
Telz xv.m. en ſont mis ſoubs la lame,
Et xv.m. vivans que pas ne blaſme,
Qui n’éuſſent valu d’or une drame
Ou de poivre, ſe ce ne fuſt pour fame.[2]
Dont a cils bien cuer entort & eſclame,
Et de pute aire,

Qui ne s’aplique à leur ſervice faire.
Et pour ce à vous, tres-douce debonnaire,
Me ſuis donnés ſanz partir ne retraire,
Pour vous ſervir tous mes jours ſanz mesfaire,
Com à celle qui eſtes exemplaire
Des biens qu’on puet dire, penſer & faire.
Or vueille Amours que je vous puiſſe plaire !
Qu’en vous eſt tout de moy faire & desfaire.
Hé ! bonne & belle,

Pour vo biauté, chaſcuns hons vous appelle
Fleur d’humaine biauté & Toute belle,
Et en douceur douce com coulombelle,

  1. Vaillans, parce qu’ils avoient aimé. Les trois derniers exemples ſont mal choiſis. Car Triſtan étoit vaillant avant d’avoir aimé Iſeult ; Paris, pour avoir enlevé Hélène, n’en fut pas meilleur. Pour Perceval, qui d’abord ne diſtinguoit pas le bien du mal, les romanciers ne lui donnent pas de maîtreſſe en titre.
  2. Une dragme d’or ou même de poivre.