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Page:Madeleine - Quelques poëtes français des XVIe et XVIIe siècles à Fontainebleau, 1900.djvu/399

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L’un vit comme un Pasteur, l’autre est Roy des provinces,
L’autre fait le marchand, l’autre s’égale aux Princes,
L’autre se feint content, l’autre poursuit du bien ;
Ce-pendant le souci de sa lime nous ronge,
Qui fait que notre vie est seulement un songe,
Et que tous nos destins ne finissent en rien.

Jamais l’esprit de l’homme ici ne se contente,
Tousjours l’ambition l’espoint et le tourmente ;
Tantost il veut forcer le temps et la saison,
Tantost il est joyeux, tantost plein de tristesse,
Tantost il est domté d’Amour et de jeunesse
Contre qui ne peut rien ny conseil ny raison.

La Beauté règne au Ciel, la Vertu, la Justice ;
En terre on ne voit rien que fraude, que malice ;
Et bref tout ce monde est un publicque marché :
L’un y vend, l’un desrobe, et l’autre achette et change,
Un mesme fait produit le blasme et la loüange,
Et ce qui est vertu semble à l’autre péché.

Le ciel ne devoit point mettre la fantaisie
Si prés de la raison ; de là la jalousie,
De là se fait l’amour dont l’esprit est vaincu.
Tandis que nous aurons des muscles et des veines,
Et du sang, nous aurons des passions humaines :
Car jamais autrement les hommes n’ont vescu.

Il ne faut espérer estre parfait au Monde,
Ce n’est que vent, fumée, une onde qui suit l’onde :
Ce qui estoit hier ne se voit aujourd’huy.
Heureux, trois fois heureux qui au temps ne s’oblige.
Qui suit son naturel, et qui, sage, corrige
Ses fautes en vivant par les fautes d’autruy.


Ils sont superbes, ces vers ! Et c’est joie d’en faire hommage à Fontainebleau. Je me