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Page:Magre - La Tendre Camarade, 1918.djvu/131

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Et je vois quelquefois l’homme pauvre et timide me sourire de loin dans cette fluidité brumeuse intermédiaire entre le songe et l’apparition où nous nous imaginons qu’évoluent les ombres vaines des morts.

— Tu m’as fait goûter, me dit-il, la douceur du regret et de la consolation. Ce qui demeure de nous, contrairement à ce qu’on croit, garde les mesquineries et les vanités humaines, quoique affaiblies et diminuées. Grâce à toi, j’ai pu m’enorgueillir qu’un petit cortège ait marché derrière ma dépouille. Je te suivrai dans la vie, à mon tour, non pour te protéger, car je suis parmi les morts, plus timide et plus inutile encore que parmi les vivants, mais pour que tu sentes autour de toi, dans la grande solitude de la vie, l’amitié invisible de celui qui ne peut rien. Et ce sera beaucoup.