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Page:Magre - La Tendre Camarade, 1918.djvu/237

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Les jardiniers et la femme de chambre m’entourent de soins, ils sont pleins d’amabilité pour moi, mais j’aimerais autant qu’ils en aient moins. J’en suis sûre, c’est un effet de mon imagination qui me fait croire toujours qu’ils me plaignent. Pourtant, ils ont l’air de vouloir compenser un tort qu’on m’a causé, de me regarder pour savoir si je ne vais pas pleurer.

Pourquoi me plaindraient-ils ? Ne suis-je pas très heureuse ? Ils ignorent que j’ai toujours été pauvre et que la vie que je mène depuis quelques jours représente pour moi la découverte d’un luxe qui m’était inconnu. Ils ne savent pas que j’aime. Lorsqu’ils me voient lire, ils pensent dans leur simplicité que je travaille et ils ne peuvent se douter que dans cet agrandissement de mon âme que procurent les livres, il y a une source de joie chaque jour nouvelle.