Aller au contenu

Page:Malato - De la Commune à l'anarchie, Tresse et Stock, 1894.djvu/149

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

daigneusement, laissa tomber de sa bouche un morceau d’écorce mâché sur la coiffure de ce chef qui, ne sentant rien, continua tranquillement son chemin.

De retour dans sa case, Apitéhéguène déroula son turban d’écorce pour se peigner avec l’espèce de trident en bois que portent comme parure quelques indigènes. Grande furent sa surprise et son indignation lorsqu’il aperçut le détritus de canne à sucre. « Qui m’a fait cette insulte ? » se demanda-t-il, sans pouvoir trouver la réponse. La nuit venue, il s’endormit, mais d’un sommeil agité. Il eut un rêve dans lequel il voyait la tribu de Pahouman montée sur un banian et qui menaçait de le frapper à coups de cannes à sucre.

— « Je tiens, mon insulteur ! » se dit Apitéhéguène et, comme il était homme de décision, il partit, dès le lendemain, pour l’île d’Ouvéa, dans une petite pirogue, afin de demander l’aide du grand-chef Ouanéguéï, qui possédait les esprits.

Le voyage s’accomplit heureusement et Ouanéguéï, mis au courant par le pauvre chef, lui tendit deux feuilles de bois sculpté, en accompagnant ce cadeau des paroles suivantes : « Je ne te donnerai maintenant que ceci, car ta pirogue est trop petite (voulait-il dire par là que la visite d’Apitéhéguène n’avait pas été assez cérémonieuse ou qu’une misérable coquille de noix ne pouvait contenir un talisman de premier ordre ? c’est un mystère que je n’ai pu élucider). Mais va quand même et fais la guerre. »

Apitéhéguène revint chez lui, assembla les vieux de sa tribu et tint conseil avec eux toute la journée. La décision fut de commencer les hostilités, le présent d’Ouanéguéï devant assurer la victoire. Le lendemain matin