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Page:Malato - De la Commune à l'anarchie, Tresse et Stock, 1894.djvu/204

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leur zèle une liberté relative et le port d’un large col rabattu de toile bleue, les distinguant des forçats de droit commun. Rendons-leur cette justice, de tous les belligérants, ils furent les plus humains : une fois les grandes luttes passées, ils cherchèrent bien moins à exterminer qu’à faire des prisonniers et à provoquer la soumission des débris de tribus traqués dans la chaîne centrale.

Beaucoup, jusqu’à cette époque terrible, avaient cru l’anthropophagie complètement disparue des mœurs néo-calédoniennes : on vit qu’il n’en était rien. De temps à autre, on découvrait cachés sous les buissons des paniers remplis de viande humaine cuite et désossée.

Les instincts ataviques, difficilement comprimés, se réveillaient.

Après tout, on l’a dit bien des fois : le mal est-il plus grand à manger ceux qui sont morts qu’à tuer ceux qui ne veulent pas mourir ?

La manière intelligente dont les Canaques préparent le mets cher aux émules de Malakiné, doit du reste, leur faire pardonner cet excès gastronomique.

Au lieu de le gâter par des combinaisons suspectes, ils lui conservent son arôme naturel en le faisant simplement cuire au four. Le procédé est des plus simples ; un trou dans le sol est chauffé avec des cailloux rougis, après quoi, on y dépose le corps, découpé en quartiers et coquettement empaqueté dans de larges feuilles de bananier ; puis, on recouvre. Au bout d’une heure ou deux selon la qualité de la viande et l’âge du sujet, on déterre et on sert. Une rosée tout à fait appétissante perle sur le rôti fumant qu’on peut compléter de mon-