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Page:Malato - De la Commune à l'anarchie, Tresse et Stock, 1894.djvu/76

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une centaine d’auxiliaires indigènes, accourut du chef-lieu d’arrondissement de Canala, situé à une trentaine de lieues par mer et à près du double par terre, aucune route directe n’existant. L’employé Fournier, qui devait, de Païta, aller ouvrir le bureau de Houaïlou fut adjoint à la colonne avec un appareil de campagne et, par intérim, je le remplaçai dans la gérance de Houaïlou.

C’était alors le poste télégraphique le plus avancé au nord, celui d’Oubatche n’étant pas encore aménagé. J’allais me trouver à deux jours de marche du pays insurgé, communiquant avec Fournier, au nord, et le bureau de Canala, au sud. Je ne détestais pas les aventures risquées et, cependant, j’étais enchanté de ne pas prêter le concours de mon appareil contre ces pauvres diables de Canaques, qui, résistant à la fois aux missionnaires et à l’armée, ne pouvaient qu’avoir toutes mes sympathies. Lorsque j’appris que Poindi-Patchili, sommé de se rendre, avait fait la réponse suivante : « Je sais que le P. Roussel possède beaucoup de beaux moutons dans sa mission et j’espère bien ne pas me rendre avant d’en avoir mangé quelques-uns, » je finis par être absolument charmé de ce guerrier sauvage, doublé d’un gastronome.

Mon ordre de départ étant enfin arrivé, je m’embarquai, le 21 avril au matin, à bord de la Seudre, en compagnie du chef-surveillant. J’avais déjà fait six mille cinq cents lieues en cinq mois de traversée, et celle de Nouméa à Houaïlou n’en comportait pas plus d’une soixantaine, mais c’était la première fois que mes parents me laissaient m’exposer loin d’eux aux traîtrises de l’Océan, même Pacifique. Un mois auparavant nous avions déjà eu un échantillon de ce que peuvent faire