Page:Malato - La Grande Grève.djvu/17

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Un tonnerre d’acclamations lui répondit.

Les mineurs n’avaient pas souvent l’occasion d’exprimer tout haut ce qu’ils pensaient. La semaine durant, ils étaient implacablement rivés à leur tâche de forçats ; le dimanche s’écoulait pour eux, moins fatigant mais à peine moins morne, au milieu de leur famille triste et misérable, ou entre les quatre murs d’un estaminet. Maintenant, dans l’enthousiasme communicatif d’un décor impressionnant et la confiance de leur nombre, ils se sentaient heureux de manifester leurs sentiments.

— Ah ! que les garde-chiourmes de Chamot viennent donc nous chercher ici ! cria Jaillot.

— Mes amis, reprit Ronnot, lorsque le silence se fut rétabli, la société de secours mutuels, qui pourra devenir plus tard un véritable syndicat — il y eut ici de nouvelles acclamations — est désormais constituée. Nommez-lui un président.

— Vous ! toi ! Ronnot !

Le mineur désigné par ce triple cri étendit la main. De nouveau, le silence se fit :

— J’accepte, camarades, dit-il. Mercredi prochain, nous nous réunirons de nouveau ici, à neuf heures du soir, pour la désignation des autres membres du bureau et l’adoption définitive des statuts. Je cède maintenant la parole au citoyen Baladier, venu de Lyon pour vous porter la bonne parole, et je suis heureux de lui souhaiter la bienvenue au nom de vous tous.

Une salve d’applaudissements salua de confiance le propagandiste que désignait Ronnot.

Baladier s’était senti contrarié du discours terre à terre, posé et pratique qui venait de servir de préambule à sa conférence. Il y avait loin d’une société de secours mutuels à la révolution sociale. Et pourtant, il ne voulait ni exciter les défiances ni se brouiller avec Ronnot dont il constatait surtout l’influence. Le policier, homme de ressources, s’en tira avec adresse.