Page:Malato - La Grande Grève.djvu/203

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— Mais, fit un des mineurs, il faudrait tout de même, au moins, un orateur de Mersey.

— Naturellement, répondit Bernard. N’ayez pas peur : on en aura.

Comme il achevait ces mots, la porte de la salle s’ouvrit et s’avança sur le seuil un homme dont l’apparition fut saluée de ce cri de haine ou de peur :

— Moschin !


XIV

MOSCHIN


Trente-cinq ans, une solide carrure, des cheveux noirs coupés en brosse, une forte moustache rejoignant vers l’oreille d’épais favoris, tel était au physique Moschin, chef de la police particulière du baron des Gourdes.

Au moral, c’était un homme intelligent, énergique et sans scrupules.

Après avoir reçu une assez bonne instruction, il s’était engagé, non par amour du métier militaire, mais pour en avoir plus tôt fini, disait-il. Et après ses cinq ans de service au 7e chasseurs à pied, il était rentré dans la vie civile.

Le grade de caporal, qu’il avait recherché uniquement pour se débarrasser sur les hommes des plus lourdes corvées, ne lui inspirait aucun désir de rengager. Il se sentait assez intelligent pour se faire une situation ailleurs qu’à la caserne.

Malheureusement, la société est encombrée d’une foule d’individus intelligents et même munis de toutes sortes de diplômes, qui passent leur vie à se chercher inutilement des situations.

L’impossibilité où il se voyait d’employer ses facultés d’une façon sérieusement rémunératrice, alors que tant d’oisifs à l’intelligence médiocre n’ont que la peine de se laisser vivre, le rendit révolutionnaire.