Page:Malato - La Grande Grève.djvu/210

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ficile de préciser l’âge, cheminait le bâton à la main.

D’allure droite et solide, on lui eût donné trente-cinq ans en le voyant simplement de dos. De face, sa figure basanée et ridée, couronnée de cheveux blancs et barrée d’une moustache de neige, lui eût fait donner vingt ans de plus. Pourtant, dans cette figure ridée, brillaient deux yeux restés jeunes.

Il était vêtu d’un complet bleu sombre, d’étoffe simple, dessinant sa taille bien musclée. À la boutonnière de la jaquette hermétiquement boutonnée s’étalait le ruban de la médaille militaire ; un chapeau melon de feutre brun posé droit sur la tête, complétait son costume.

Somme toute, le voyageur avait la mine d’un sous-officier d’Afrique, retraité, mais ayant gardé le pli militaire et l’empreinte physique du séjour colonial.

Sans doute était-il descendu à la station précédente, car il ne paraissait point fatigué, et la poussière de la route ne ternissait que très peu le brillant de ses solides chaussures.

En tout cas, Mersey semblait lui être une localité familière, car il se dirigeait droit devant lui, sans hésitation, s’arrêtait à peine un instant de-ci de-là pour contempler quelque maison neuve ou quelque voie récemment percée.

Il se dirigea vers le faubourg de Vertbois, s’engagea sur la route de Saint-Phallier et la suivit jusqu’à la hauteur du passage des Lianes.

Alors il s’arrêta court et une expression de surprise douloureuse se peignit sur sa physionomie comme s’il eût été déçu dans quelque attente.

Sur la porte d’une maison basse aux tuiles rouges, un vieux, en bras de chemise, fumait sa pipe. Le voyageur s’approcha.

— Pardon, fit-il, en soulevant son chapeau, est-ce qu’il n’y avait pas ici un menuisier ?

Le vieillard hocha la tête.

— Oh ! murmura-t-il, vous n’avez pas besoin d’al-