Page:Malato - La Grande Grève.djvu/223

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compte combien cette thérapeutique était dérisoire. Pourtant, il résolut de se priver de boire pour entretenir humide cette compresse. Avant tout, il fallait qu’il retrouvât l’exercice de sa jambe. Le salut, s’il y avait un salut possible, était à ce prix.

Ses provisions, viande de chien et fruits, éparpillées et écrasées dans sa chute, formaient une sorte de hachis des moins appétissants. Détras mit cependant de côté tout ce qu’il put ramasser de ces débris : c’était toujours de la nourriture, de la vie.

Du reste, il ne se sentait aucune faim et s’en réjouissait, se disant que ces bribes de provisions dureraient plus longtemps.

La nuit fut atroce. Détras, après avoir rôti pendant le jour, se sentit glacé par la rosée et comme cloué à terre. Ce fut seulement lorsque le soleil se fut élevé au-dessus de l’horizon qu’il commença à pouvoir remuer les membres.

Il passa ainsi trois jours, buvant à peine, mangeant quelques bouchées et se traînant sur les poignets afin d’éviter de fatiguer sa jambe. De tous côtés s’étendait le précipice avec ses parois à pic et au-dessus du précipice reprenait la déclivité presque verticale de la montagne.

Pourrait-il jamais sortir de là ?

Cependant, sa jambe, quoique toujours enflée et engourdie, le faisait moins souffrir. Décidément, il n’avait rien de cassé, seulement une luxation, et par des frictions énergiques, il s’efforçait de rétablir le jeu des muscles.

Encore deux jours et il pourrait recommencer à marcher bien que boitant.

Mais ses provisions étaient épuisées, sa calebasse presque tarie. Pourrait-il attendre encore deux jours ?

Avec son tamioc, il avait ébauché quelques marches dans la muraille rocheuse de quoi poser le pied et une main, s’aidant ainsi pour l’ascension. Mais l’état de sa jambe, qu’il traînait comme un boulet, ne lui