Page:Malato - La Grande Grève.djvu/447

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— Il faudrait tuer dans l’œuf le syndicat jaune, opina Bernard.

— Pour cela, il serait nécessaire de connaître ses fondateurs, dit Paryn.

Il regardait Bernard : celui-ci eut un sourire.

— Ses fondateurs… tout le monde peut deviner qui ils sont : le baron des Gourdes, Troubon, Moschin ; puis, quelques intermédiaires entre eux et les syndiqués.

— Justement. Qui sont ces intermédiaires ?

— Parle, fit Ouvard, voyant que son ami hésitait.

Tous avaient les yeux sur Bernard, devinant que celui-ci en savait et en pensait plus long que les autres.

— Écoutez, dit l’ancien mineur, il y a deux sentiments que tout homme de cœur doit éprouver à un égal degré : le besoin de mettre ses camarades en garde contre une trahison, la crainte d’accuser de trahison un innocent.

Paryn approuva d’un signe de tête. Oui, cette accusation de mouchardage, lancée fréquemment chez les révolutionnaires à la tête d’individus coupables seulement quelquefois d’originalité ou de gaucherie était une des choses qui le choquaient le plus. Est-ce que tout le monde n’était pas, sous la grande Révolution, agent de Pitt et de Cobourg ; sous le siège de Paris, espion allemand ; sous la Commune, agent de Versailles ; sous la réaction versaillaise, communard ?

— N’importe, fit Détras, dis ce que tu sais ou ce que tu crois savoir. Nous n’ignorons pas que personne n’est infaillible.

— Eh bien, répondit Bernard, je mettrais ma main au feu que l’agent de la Compagnie, dans cette affaire-là, c’est Canul.

Ouvard prit la parole :

— Je suis de l’avis de Bernard, dit-il. Le particu-