Page:Malato - La Grande Grève.djvu/494

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avait fait figure dans l’histoire : la Convention, et encore pour deux ans à peine, juste le temps pendant lequel une poignée de révolutionnaires la dominèrent, tandis que la poussée populaire des clubs et des sections la contraignait de marcher de l’avant. Une fois à la Chambre des députés, ne serait-il pas, lui comme tant d’autres, annihilé par le milieu ? son initiative ne se perdrait-elle point, paralysée dans tous les rouages des commissions et sous-commissions chargées huit fois sur dix d’enterrer les réformes ?

La nomination de Jolliveau et l’attitude forcément réactionnaire du nouveau préfet vinrent mettre fin à ses hésitations.

— Je serai député, décida-t-il. Ne serait-ce que pour lutter contre lui et ne réussirais-je qu’à en débarrasser le département, je croirais avoir bien mérité de mes électeurs.

Le jour où l’on apprit que Paryn acceptait d’être, dans la circonscription, le porte-drapeau du radicalisme-socialisme, il y eut dans Climy une véritable effervescence. Poulet, Petit, Bussy, tous les membres de son comité vinrent en délégation le remercier solennellement, tandis que Brigitte hochait la tête avec mélancolie. Elle voyait le docteur élu sans difficulté : on l’aimait tellement dans le pays ! Mais après, que deviendrait-il dans cette Chambre des députés, qu’elle entrevoyait comme un lieu terrifiant, empli de tonnerres et de batailles, dans ce Paris où elle n’avait jamais mis les pieds et qui lui semblait un gouffre ?

— N’ayez pas peur, ma brave Brigitte ! lui dit Paryn, ému de sa sollicitude angoissée. Je vous reviendrai de temps à autre, tout entier.

Il ajouta entre ses dents : « Si je suis élu. » Mais de cette élection, il ne doutait guère.

Pendant ce temps, les cabarets toujours rivaux de l’Oiseau rouge et du Poisson bleu retentissaient de