Page:Malleson - Histoire des Français dans l’Inde.djvu/387

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
367
TRAITÉ HONTEUX DE GODEHEU

Mais, de toutes ces clauses, la quatrième était la plus injurieuse pour les intérêts français ; elle proposait que la ville de Mazulipatam avec certains districts àl’entouretrile de Divi, appartenant l’une et l’autre aux Français, fussent indivises entre les deux puissances rivales. La réalisation de cette seule proposition entraînait de la part des Français le sacrifice d’un revenu annuel fixe de quatre millions de francs. Les articles 5, 6 et 7 disposaient également du territoire français à l’avantage de leurs rivaux.

Dans les autres articles, surtout dans ceux qui étaient relatifs aux alliés des deux puissances, la balance penchait toujours du même côté. Les Anglais n’avaient qu’un allié : le rajah de Tanjore ; car Mahomed-Ali n’était qu’un instrument, un prétexte au nom duquel ils avaient cherché, en s’abritant à l’ombre de son autorité usurpée, à détruire l’influence française. Les Français, au contraire, avaient les Mahrattes, les Mysoriens et le soubab. Ceux-ci n’avaient aucune connaissance du traité, et il aurait cependant pour résultat d’imposer la loi anglaise, non-seulement aux Français, mais encore aux princes indiens indépendants ; de forcer Salabut-Jung à accepter pour nabab du Carnate l’homme qu’il avait à plusieurs reprises déclaré rebelle et hors la loi ; de contraindre les Mysoriens et les Mahrattes à se désister de leurs prétentions sur une ville qu’ils regardaient déjà comme la leur. Comme complément à cette condition, les Français alliés de ces princes devaient garantir qu’ils l’exécuteraient.

Tel était le traité de Godeheu ! traité par lequel les Français renonçaient à tout ce qui leur avait coûté tant de contestations. Il abandonnait la nababie du Carnate, il abandonnait ses alliés, il abandonnait l’influence française et l’honneur français. Pouvait-on voir un contraste plus frappant avec Dupleix ? Les Anglais lui avaient offert de lui garantir la possession de tous ces territoires pourvu qu’il résignât le titre et l’emploi de nabab du Carnate. Son successeur renonçait, non-seulement à cette dignité, mais encore à tous les avantages matériels que la France s’était assurée et dont la possession incontestée suffisait en tout état de choses pour lui conserver une puissance bien supérieure à celle de ses rivaux. Ce n’est certes pas prononcer une sentence trop sévère ou une criti-