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Page:Marais - La Maison Pascal.djvu/159

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Plein d’amertume, il contemplait Lucien qui avait encore fort bon air — malgré les éraflures de la quarantaine — grâce à sa haute taille, sa longue moustache rousse et sa verdeur persistante, ses prunelles claires de vrai northman.

Le jeune Champion souffrait : l’envie le tenaillait de ses pinçons douloureux. Il se comparait in petto à M. Pascal. Il se dressa sur la pointe de ses talons et pensa : « Tout de même, je suis plus grand que lui. » Puis : « J’ai les épaules moins larges que les siennes, mais il commence à prendre du ventre. » Ensuite : « Il a les yeux glauques, les miens sont d’un bleu pur. » Et enfin : « Il n’est pas mal… Pourtant il engraisse, il s’épaissit : il sera affreux à cinquante ans… Moi, j’ai vingt-deux ans ! »

Ainsi les jeunes amours se consolent des rivalités, en les opposant au triomphe de leur printemps.

De son côté, Lucien Pascal réfléchissait. La grâce si séduisante de Camille l’avait frappé. S’avouant avec impartialité que les