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Page:Marbeau Le charme de l histoire 1902.djvu/282

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le charme de l’histoire

homme de haut rang le prenait sans scrupule comme il le dépensait sans mesure ; ces choses glissaient sur lui sans le tacher. C’était se tacher peut-être que contracter une mésalliance, parce que c’était déroger, c’était altérer pour toute la race à venir la pureté du blason ; mais rançonner une ville, pressurer une province ou ramasser les dons du roi, et relever ainsi la fortune de ses descendants, c’était faire acte de gentilhomme.

Nous pensons et nous sentons autrement aujourd’hui. Dans notre société démocratique qui croit s’être affranchie des vieux préjugés et qui prétend ne faire de distinction entre les hommes que pour leur éducation ou pour leur valeur personnelle, la différence la plus réelle est celle que crée la fortune ; c’est la moins discutable, celle qui se traduit par les effets les plus positifs. Nous n’irons certainement pas jusqu’à dire que la richesse constitue la seule aristocratie restée puissante devant l’opinion ; toutefois on ne peut nier qu’elle ne mette un homme en relief, et qu’elle ne lui donne, dans une large mesure, l’influence réservée jadis au rang et aux dignités.

Mais précisément parce que la question d’argent a pris dans notre société effacée un rôle prépondérant ; parce que, plus qu’autrefois, il est vrai de dire, suivant l’énergique expression de la Comtesse Diane : « Le MOI est quand il a » (50), tout ce qui