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Page:Marbeau Le charme de l histoire 1902.djvu/354

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le charme de l’histoire

ment la guerre civile et la guerre étrangère avaient rendu la misère si générale, les mendiants étaient devenus un tel danger dans les campagnes et même dans les villes, que l’autorité publique se décida à transformer en obligation légale ce qui jusque-là n’avait été qu’une obligation de conscience pour les particuliers et une règle de police pour les communes. Cette transformation s’effectua d’une manière qui dut sembler toute naturelle. L’Église et l’État étaient alors unis et se prêtaient un mutuel secours pour atteindre le but que tous deux se proposaient : guider les hommes dans la voie de la religion et de la prospérité matérielle. Les divers services de l’assistance étaient confiés au clergé et formaient une des branches de l’administration ecclésiastique. La législation charitable était régie par le droit canonique, et, pour subvenir aux dépenses nécessitées par le soin des malades et l’entretien des pauvres, l’Église ne comptait sur d’autres ressources que les dons volontaires. Elle recommandait aux fidèles de consacrer aux pauvres une partie de leurs revenus. Elle leur rappelait que l’aumône, « la rançon de l’âme », suivant l’expression de Saint Jean-Chrysostome, est le plus sûr moyen de racheter ses fautes et de mériter les récompenses éternelles. Entre les mains de l’Église, l’exercice de la charité n’était qu’un devoir de conscience. Lorsque l’autorité civile, pressée par la