Aller au contenu

Page:Marchant de Beaumont - Manuel et itinéraire du curieux dans le cimetière du Père la Chaise.djvu/130

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

propre ; il suivit le torrent dont l’impulsion lui sembla propice dans le moment pour remplir son vœu. Pendant long-temps il louvoya. Souvent déçu dans sa politique personnelle, il fit naufrage ; mais son adresse sut toujours regagner l’un ou l’autre rivage. De loin il prévit qu’un génie vaste, audacieux, asservirait sous son joug, par le pouvoir militaire, les partis qui tourmentaient la France. Son étoile lui montra dans Bonaparte l’homme dont la gloire, le caractère, l’ascendant de la victoire, devaient enchaîner la patrie. Dès lors il se voua sans réserve à sa destinée ; son élocution, flexible à toutes les impressions de sa propre ambition, sut toujours trouver des couleurs pour pallier tout ce que le despotisme et la vanité produisirent de révoltant ; mais il n’eut pas de voix pour faire entendre au maître, dont il se montra le complaisant servile, le langage de la vérité, de la raison, de la justice, tandis qu’il l’entraînait lui-même, par sa flatterie, dans le précipice de malheurs où tous les deux tombèrent. Je plains l’existence politique d’un tel homme ; je la plains d’autant plus qu’il put s’abuser par l’étonnante fortune de son héros, à laquelle il semblait que rien ne dût résister. Quel est son sort après son élévation de quelques années ? La fortune change. Ses lèvres ont-elles seulement touché la coupe