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Page:Marie Nizet - Le capitaine vampire.djvu/105

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— Quand je serai mort, tu prendras mon grand poignard à manche de corne et tu chercheras le Liatoukine.

Cerneano donna l’ordre de battre le rappel.

Mitica, qui aidait à transporter les blessés dans des cabanes de planches, tenant momentanément lieu d’hôpital, boucla précipitamment sa ceinture et saisit son fusil.

Une voix faible murmura à côté de lui ce mot « Frate ! »[1] si doux au cœur du Roumain éloigné de la patrie. Fort surpris s’entendre sortir des paroles valaques de la bouche d’un soldat turc, Mitica s’approcha.

— Frère, reprit le blessé en se soulevant avec peine sur son coude, viens-tu de la terre roumaine ?

La terre roumaine proprement dite est la Valachie.

— Je suis de Bucharest, répondit Mitica.

Une joie subite éclaira les traits défigurés du mourant.

— De Bucharest ! Et laissant retomber sa tête sur la giberne qui lui servait d’œiller, Bucharest est si grand ! soupira-t-il.

— Je suis des environs de Baniassa.

— Baniassa ! Alors tu connais le vieux Mozaïs, Aleca, Zamfira ?

— Si je connais Zamfira ! s’écria Sloboziano, mais si j’en réchappe, je l’épouse, la Zamfira !

Les yeux ternis du musulman reprirent un peu de leur éclat.

— Je ne t’ai jamais vu, dit-il en considérant attentivement Mitica.

— Ce n’est pas une raison, camarade !

  1. Frère.