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Page:Marie Nizet - Le capitaine vampire.djvu/99

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Le général, qui n’avait pas été invité à s’asseoir, essuyait les sarcasmes du grand-duc avec un sang-froid remarquable.

— Chez nous, dit-il gravement, les officiers se respectent trop pour oser lever l’ombre de leur main sur leurs inférieurs.

Nicolas Nicolaevitch se renfonça dans son fauteuil avec un éclat de rire aigu.

— Chez vous, Monsieur, chez vous ! M’est avis que vous oubliez un peu que vous n’y êtes pas, chez vous !

Le fauteuil fit volte-face, et sur un signe du grand-duc qui se disposa à allumer un cigare, la voix nasillarde de Xénianine s’éleva de nouveau au milieu du plus profond silence :

Népriatel rinoulsa f’gorot…[1]

Cerneano se sentit rougir sous l’affront infligé à ses cheveux blancs, et sa main, que l’indignation rendait tremblante, laissa retomber sur lui la portière de velours.

Le camp roumain tout entier se porta au-devant du vieux général, et, voyant ces regards pleins d’une impatience anxieuse, Cerneano secoua tristement la tête.

— Ah ! mes enfants, dit-il avec un accent dont rien ne pourrait rendre l’amertume, que sommes-nous venus faire de ce côté du Danube !

 

Quinze jours après cette scène caractéristique, une compagnie de Cosaques ramenait à leur régiment les deux héros de la déplorable aventure qui avait failli rompre brusquement les relations amicales d’Alexandre II et de Charles 1er.

  1. L’ennemi se précipita dans la ville.