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Page:Marivaux - Théâtre, vol. I.djvu/380

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faut pourtant que je vous dise que, si vous ne mettez ordre à ce qui arrive, votre prétendu n’aura plus de cœur à donner à mademoiselle votre fille. Il est temps qu’elle se déclare, cela presse ; car, un jour plus tard, je n’en réponds plus.

Monsieur Orgon.

Eh ! d’où vient qu’il ne voudrait plus de ma fille, quand il la connaîtra, te défies-tu de ses charmes ?

Lisette.

Non ; mais vous ne vous méfiez pas assez des miens. Je vous avertis qu’ils vont leur train, et je ne vous conseille pas de les laisser faire.

Monsieur Orgon.

Je vous en fais mes compliments, Lisette. (Il rit.) Ah ! ah ! ah !

Lisette.

Nous y voilà ; vous plaisantez, monsieur ; vous vous moquez de moi ; j’en suis fâchée, car vous y serez pris.

Monsieur Orgon.

Ne t’en embarrasse pas, Lisette ; va ton chemin.

Lisette.

Je vous le répète encore, le cœur de Dorante va bien vite. Tenez, actuellement, je lui plais beaucoup ; ce soir, il m’aimera ; il m’adorera demain. Je ne le mérite pas, il est de mauvais goût, vous en direz ce qu’il vous plaira, mais cela ne laissera pas que d’être. Voyez-vous ? demain, je me garantis adorée.

Monsieur Orgon.

Eh bien, que vous importe ? S’il vous aime tant, qu’il vous épouse.