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Page:Marivaux - Théâtre, vol. I.djvu/96

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s’entretenir de loin ; vraiment on s’entend bien mieux. Lui parlerez-vous avec une sarbacane, ou par procureur ?

La Comtesse.

Mademoiselle Colombine, vos fades railleries ne me plaisent point du tout ; je vois bien les petites idées que vous avez dans l’esprit.

Colombine.

Je me doute, moi, que vous ne vous doutez pas des vôtres ; mais cela viendra.

La Comtesse.

Taisez-vous.

Colombine.

Mais aussi de quoi vous avisez-vous, de prendre un si grand tour pour parler à un homme ? « Monsieur, soyons amis tant que nous resterons ici ; nous nous amuserons, vous à médire des femmes, moi à mépriser les hommes. » Voilà ce que vous lui avez dit tantôt. Est-ce que l’amusement que vous avez choisi ne vous plaît plus ?

La Comtesse.

Il me plaira toujours ; mais j’ai songé que je mettrai Lélio plus à son aise en ne le voyant plus. D’ailleurs la conversation que nous avons eue tantôt ensemble, jointe aux plaisanteries que le baron a continué de faire chez moi, pourraient donner matière à de nouvelles scènes que je suis bien aise d’éviter. Tiens, prends ce billet.

Colombine.

Pour qui ?

La Comtesse.

Pour Lélio. C’est de cette paysanne qu’il s’agit ; je lui demande réponse.