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Page:Marivaux - Théâtre, vol. I.djvu/98

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Arlequin.

Je vous conseille de lui répondre sur une carte ; cela sera bien drôle.

Lélio, lit.

« Monsieur, depuis que nous nous sommes quittés, j’ai fait réflexion qu’il était assez inutile de nous voir. »

Oh ! très inutile ; je l’ai pensé de même.

« Je prévois que cela vous gênerait ; et moi, à qui il n’ennuie pas d’être seule, je serais fâchée de vous contraindre. »

Vous avez raison, madame ; je vous remercie de votre attention.

« Vous savez la prière que je vous ai faite tantôt au sujet du mariage de nos jeunes gens ; je vous prie de vouloir bien me marquer là-dessus quelque chose de positif. »

Volontiers, madame ; vous n’attendrez point. Voilà la femme du caractère le plus passable que j’aie vue de ma vie. Si j’étais capable d’en aimer quelqu’une, ce serait elle.

Arlequin.

Par la morbleu ! j’ai peur que ce tour-là ne vous joue un mauvais tour.

Lélio.

Oh ! non ; l’éloignement qu’elle a pour moi me donne, en vérité, beaucoup d’estime pour elle ; cela est dans mon goût. Je suis ravi que la proposition vienne d’elle ; elle m’épargne, à moi, la peine de la lui faire.

Arlequin.

Pour cela, oui ; notre dessein était de lui dire que nous ne voulions plus d’elle.