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UNE SEMAINE D’OURAGAN RÉVOLUTIONNAIRE

étrangères, sur la place du Palais d’Hiver.

Mais voici qu’à l’intersection de la Newsky et de la Morskaïa, les deux manifestations, — pour et contre le gouvernement provisoire, — se rencontrent. Une bousculade rapide se produit. Le drapeau de la manifestation promilioukovienne est enlevé au bout des baïonnettes et lacéré. Un autre le remplace, bientôt lacéré à son tour. Cris dans la foule. Fuite dans toutes les directions… La milice paraît… Des citoyens de bonne volonté s’appliquent à rétablir l’ordre. On se donne rendez-vous, le soir, à la place du Palais Marie.

Et, dans la clarté prolongée des nuits blanches commençantes, puis plus tard, à la lueur indécise des globes électriques, devant les fenêtres éclairées du palais où le gouvernement provisoire a repris ses séances, la grandiose manifestation recommence. Mais les régiments ne sont pas revenus. Du Palais Marie à la cathédrale d’Isaac, majestueusement silhouettée sur le ciel, l’immense place retentit des cris, des appels, des hourrahs échappés à plus de cent mille poitrines. Plus de manifestations de haine ou de colère : rien qu’une attente anxieuse et une vibrante espérance.