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Page:Markovitch - La Révolution russe vue par une Française, 1918.djvu/35

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UNE SEMAINE D’OURAGAN RÉVOLUTIONNAIRE

« La foule et les troupes révoltées emplissaient la Perspective Litiény. Un combat s’y livrait. On entendait des cris, des ordres, des coups de feu. Les balles claquaient contre les murs en ricochant ou éclataient contre les fenêtres. Les vitres volaient en éclats… Jurements d’hommes, cris de femmes, fuite brusque de gens qui s’affolent, blessés qui tombent et qu’on piétine : une mêlée épique et sanglante ! Vraiment, cela est pire que sur le front ! Là-bas, on sait du moins de quel côté il faut attendre les coups ! Ici, c’est le chaos, la mort à droite, à gauche, devant, derrière, en haut, partout !… En face de l’Arsenal, le Palais de Justice brûle comme une torche. Les gerbes de flammes incendient le ciel, jettent des lueurs inattendues et magnifiques sur les glaces et les neiges accumulées de la Néva. Les canons de bronze, splendidement ouvrés et verdis par le temps, qui s’allongent sur la plate-forme de l’Arsenal, léchés par l’incendie, ont l’air de monstres accroupis et glorieux assistant à leur apothéose. Des débris de papiers brûlés tourbillonnent dans l’air… Des clameurs éperdues montent de la foule…