Aller au contenu

Page:Marquiset,À travers ma vie,1904.djvu/241

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Il y a, en apparence, chez M. Pons, une extrême bonhomie, on est reçu chez lui avec bienveillance et cordialité ; il est honorable sans ostentation et son abord est simple et facile. Ces qualités qu’on apprécie dans l’homme du monde doivent l’être davantage dans celui qui occupe de hautes fonctions publiques, mais seules elles ne suffisent pas pour constituer l’administrateur.

Et d’abord, l’extérieur de ce brave préfet ne prévient pas en sa faveur ; il est commun, voire même un peu charge et nuit beaucoup à l’effet que doit produire dans les salons et sur l’esprit des masses celui que le gouvernement a revêtu d’une mission toute de dignité et de délicatesse. Son nez d’une grosseur phénoménale attire toujours l’attention. Imaginez-vous une énorme truffe écarlate s’épanouissant entre deux joues empourprées et portant avec une fatuité comique une lourde paire de lunettes en or qui chevauche péniblement sur son éminence la plus prononcée. En voyant ce nez fabuleux que connaissent tous les enfants du Jura, le facétieux général Verdière, qui commande le département, s’est écrié : « Ah ! quel beau nez (bonnet) rouge ! »

M. Pons, que l’on peut regarder comme un honnête homme, est loin de posséder le mérite et la tenue qu’on exige ou plutôt qu’on devrait exiger dans les préfets du jour. Son accent méridional se marie peu avec l’accent des habitants de notre pays, mais il convient parfaitement à ses allures et à son genre de conversation. Toujours il est en scène, toujours il parle de lui