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Page:Marquiset,À travers ma vie,1904.djvu/245

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dais à être introduit auprès du ministre pour une mission importante de la part d’un préfet : « Cela est impossible, me dit le cerbère en habit noir, M. le ministre est en conférence avec les ambassadeurs de la Porte et de la Perse et je ne puis interrompre cette audience, mais si vous voulez parler à M. de Rémusat, chef du cabinet, je puis vous annoncer à l’instant même. » J’acceptai cette proposition et me voilà en présence de M. de Rémusat, ne sachant par où commencer mon discours ; mais en échangeant avec lui quelques phrases banales, préliminaires ordinaires de ceux qui hésitent à entrer franchement en matière, je me rappelai tout à coup que mon interlocuteur était un ami intime de Théodore Jouffroy et qu’ils avaient coopéré ensemble à la création du Globe. Je savais M. de Rémusat homme d’esprit, et son air bienveillant m’enhardit à lui faire la confidence de l’objet de mon voyage : « Votre mission est sérieuse, me dit-il, un préfet obligé de se retirer dans des circonstances semblables, cela mérite l’attention du cabinet, et, dès que M. Casimir Périer en aura fini avec ses ambassadeurs, je lui proposerai de vous recevoir. Prenez la peine d’attendre un moment. » Une demi-heure après, j’étais introduit près de M. Casimir Périer ; c’était un fort bel homme au teint bilieux, à la physionomie énergique, et portant relevées sur le front d’énormes lunettes d’or ; il était appuyé, les mains croisées derrière le dos, contre la tablette de la cheminée. En me voyant entrer et en m’entendant nommer, le