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Page:Marquiset,À travers ma vie,1904.djvu/271

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invitation ; il se rendait souvent au palais du marquis, et sa vie n’était plus qu’une longue suite de félicité trompeuse ; il voyait Marie tous les jours, lui donnait des leçons de peinture, l’accompagnait au théâtre, et chaque mot qui sortait de sa bouche était pour lui un mot d’espoir et de bonheur. Hélas ! Marie, candide et simple, heureuse seulement des prévenances, des soins de Léopold, ne répondait point à son amour.

Deux mois se passèrent ainsi dans les plus douces illusions. Un soir, M. de Valdahon reçut un billet de son ami ; il ne contenait que ces mots tracés d’une main tremblante : « J’ai besoin de vous, je vous attends. » M. de Valdahon partit sur-le-champ ; il trouva Léopold dans son lit ; sa figure était contractée de manière à effrayer, et une fièvre délirante agitait tous ses membres. Au milieu des phrases sans suite qui sortaient de sa poitrine oppressée, l’ami effaré apprit que la fille du marquis Enrico *** allait se marier avec un jeune seigneur qu’elle aimait éperdument. À cette nouvelle donnée à Léopold par le marquis lui-même, son cœur s’était brisé, sa raison avait fui, et il était rentré sous le poids d’une aliénation cruelle qui l’avait privé de toutes ses facultés.

M. de Valdahon crut remarquer que sa présence augmentait encore l’exaspération du malade ; il sortit donc promptement et courut chercher un médecin. Lorsqu’il revint, il y avait de l’agitation dans la rue, la porte de la maison était ouverte…, le malheureux artiste s’était brûlé la cervelle.