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Page:Martin - Histoire des églises et chapelles de Lyon, 1908, tome I.djvu/174

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histoire des églises et chapelles de lyon

gardé dans leur cœur et dans leur esprit le précieux et vif souvenir de cette chapelle presque misérable, parce que saint François de Sales « leur grand patriarche » y célébra souvent la messe de 1618 à 1622. On sait qu’en ces quatre ans, il fit cinq voyages à Lyon : au dernier, il y séjourna, avec les cours de France et de Savoie. Monseigneur de Marquemont dont il devait être l’hôte se trouvant à Rome où il fut fait cardinal, les sœurs eurent la joie de posséder leur fondateur dans leur petit logement, c’est-à-dire dans la maison Richard devenue la maison de leur jardinier ; de son côté le bon évêque fut tout aise de s’échapper ainsi de l’apparat. La ville faisait une entrée magnifique au roi et à la reine-mère : « le saint prélat, raconte le manuscrit déjà cité, laissa aller tous ces gens voir cette grande pompe et demeura tout seul dans notre parloir, comme un père avec ses enfants, sans se soucier de voir tout cet appareil du monde. Il nous fit, ce même jour, un très beau sermon tant sur le mystère — c’était le jour de l’Immaculée Conception — que sur l’entrée du roi et nous dit ce qu’il fallait considérer en l’un et en l’autre. La reine Marie de Médicis entra dans notre monastère avec un grand nombre de dames de la cour et y entendit les vêpres ; nos sœurs étaient si recueillies que pas une ne leva les yeux et ne sut dire comment Sa Majesté ni aucune de ses dames étaient vêtues. Le 25 décembre, le bienheureux nous dit la messe à minuit, où la communauté communia et à la fin de la messe, quoi qu’il fît bien froid, il nous fit une belle exhortation sur 1 anéantissement et la naissance de l’Enfant Dieu ».

Force nous est d’abréger ce naïf et charmant récit très circonstancié : « Le jour de la Saint-Jean il dit encore la messe et communia ses chères filles. Après quoi, il ouït la confession générale de notre mère de Blonay. Notre mère aperçut en ses yeux quelque changement causé par le catarrhe qui commençait à se former et elle lui dit : Monseigneur, vous vous trouvez mal ? Il répondit : Ma fille, tout revient à bien à ceux qui aiment Dieu ; il n’est pas loin de midi, s’il m’est possible je reviendrai tantôt recevoir votre novice à la profession : cette novice était sœur Marie-Éléonore Gontal. La bonne mère se mit à genoux ; il lui dit pour dernière parole : Adieu, ma fille, je vous laisse mon esprit et mon cœur. » L’après-midi, tandis qu’on préparait la cérémonie de profession le saint tombait en apoplexie, le lendemain, 28 décembre, il expirait. Toute la ville accourut à la pauvre logette. On n’ignore pas que Lyon et Annecy se disputèrent l’illustre corps ; Annecy l’emporta, grâce au testament même de saint François que la volonté du duc de Savoie et du roi de France fit exécuter. Pendant le débat, la dépouille mortelle du saint était restée en dépôt dans la chapelle de ses religieuses : il fallut hélas s’en séparer. « Mais le soir même de ce 29 décembre, continue le document, le cœur de notre bienheureux père nous fut apporté par M. Ménard, secrétaire de la paroisse Saint-Nizier, vicaire général, accompagné de M. le curé de la paroisse, de M. l’abbé de Mozac et de beaucoup d’ecclésiastiques avec des flambeaux ».

Après avoir été, de la sorte, insignement honorée, la chapelle Sainte-Marie de Bellecour fut remplacée par une église qui, commencée en 1621, fut achevée à la fin de 1627, et consacrée le 8 décembre. « Elle était, écrit Steyert, orientée régulièrement, prolongeant le cloître, le long de la rue à l’ouest, jusqu’à 1m50 environ de la porte de la