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Page:Martin du Gard - Le Pénitencier.djvu/117

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demande : Qu’est-ce que tu comptes faire ? »

— « Moi ? » murmura M. Thibault avec lenteur ; il eut un sourire froid et entr’ouvrit une seconde les paupières : « Cela ne fait pas de doute : semoncer vertement M. Faîsme pour t’avoir reçu sans mon autorisation ; et t’interdire à jamais l’accès de la colonie. »

Antoine croisa les bras :

— « Alors, tes brochures, tes conférences ! Toutes tes belles paroles ! Dans les congrès, oui ! Mais devant une intelligence qui sombre, fût-ce celle d’un fils, rien ne compte : pas de complications, vivre tranquille, et advienne que pourra ? »

— « Imposteur ! » cria M. Thibault. Il se mit debout. « Ah, ça devait arriver ! Je te voyais venir depuis longtemps. Certains mots qui t’échappent à table, tes livres, tes journaux… Ta froideur à accomplir tes devoirs… Tout se tient : l’abandon des principes religieux, et bientôt l’anarchie morale, et la révolte pour finir ! »

Antoine secoua les épaules :

— « N’embrouillons pas les histoires. Il s’agit du petit, et ça presse. Père, promets-moi que Jacques… »