Aller au contenu

Page:Martin du Gard - Le Pénitencier.djvu/18

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

là les enfants, elle conduisit Antoine dans le salon ; et dès qu’elle eût compris ce qui ramenait, elle se leva pour chercher son fils.

Daniel paraissait maintenant avoir dix-sept ans, bien qu’il en eût quinze : une ombre de moustache accusait la ligne de la bouche. Antoine, intimidé, regardait le jeune homme bien en face, de son air un peu provoquant, qui semblait dire : « Moi, vous savez, je vais au but sans détours. » Et, comme autrefois, un secret instinct lui faisait exagérer un peu cette allure de franchise, dès qu’il se trouvait en présence de Mme de Fontanin.

— « Voici », fit-il. « C’est pour vous que je viens. Notre rencontre, hier, m’a fait réfléchir. » Daniel parut surpris. « Oui », reprit Antoine, « nous avons à peine échangé quelques mots, vous étiez pressé, moi aussi ; mais il m’a semblé… Je ne sais comment dire… Et puis, vous ne m’avez demandé aucune nouvelle de Jacques : j’en ai conclu qu’il vous écrivait. N’est-ce pas ? Je soupçonne même qu’il vous écrit des choses, des choses que, moi, je ne sais pas et que j’ai besoin de savoir. Non, attendez, écoutez-moi. Jacques a quitté Paris depuis juin dernier ; nous allons être en avril ; cela