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Page:Martin du Gard - Le Pénitencier.djvu/219

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Jacques, « ce n’était pas la même chose ». Mais Antoine était beau, elle aimait son air fatal, et lui pardonnait d’être comme les autres.

Elle avait épingle sa broche au rideau, et se déshabillait d’un air distrait, songeant déjà au voyage. Lorsqu’Antoine la saisit dans ses bras, elle eut un rire saccadé qui se perdit dans sa gorge :

— « Liebling… Sois langoureux pour notre dernier soir… »


Antoine fut absent toute la soirée. Vers onze heures, Jacques l’entendit rentrer et gagner sa chambre sans faire de bruit. Il allait se coucher, il ne l’appela pas.

En pénétrant dans son lit, son genou heurta quelque chose de dur : un paquet, une surprise ! C’était, dans du papier d’étain, quelques tortillons à l’anis, gluants de caramel ; et, plié dans un mouchoir de soie aux initiales de Jacques, un petit billet mauve :

À mon bien-aimé !

Jamais encore elle ne lui avait écrit. C’était comme si ce soir elle fut venue se pencher à son chevet. Il riait de plaisir en décachetant l’enveloppe :