Page:Maupassant - Clair de lune, 1905.djvu/49

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
41
un coup d’état

pareil à une tache, presque rien. L’effet était manqué. M. Massarel tira un second coup, qui fit un second trou, puis un troisième, puis, sans s’arrêter, il lâcha les trois derniers. Le front de Napoléon volait en poussière blanche, mais les yeux, le nez et les fines pointes de moustaches restaient intacts.

Alors, exaspéré, le docteur renversa la chaise d’un coup de poing et, appuyant un pied sur le reste du buste, dans une position de triomphateur, il se tourna vers le public abasourdi en vociférant : « Périssent ainsi tous les traîtres ! »

Mais comme aucun enthousiasme ne se manifestait encore, comme les spectateurs semblaient stupides d’étonnement, le commandant cria aux hommes de la milice : « Vous pouvez maintenant regagner vos foyers. » Et il se dirigea lui-même à grands pas vers sa maison, comme s’il eût fui.

Sa bonne, dès qu’il parut, lui dit que des malades l’attendaient depuis plus de trois heures dans son cabinet. Il y courut. C’étaient les deux paysans aux varices, revenus dès l’aube, obstinés et patients.