Page:Maupassant - Contes du jour et de la nuit 1885.djvu/353

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longtemps… Tu te le rappelles, n’est-ce pas ! C’était probablement la première fois… oui… Tu étais si pâle en rentrant au salon !

« Je vous ai vus ; j’étais là, dans le massif. J’ai eu une rage ! Si j’avais pu, je vous aurais tués !

« Je me suis dit : Il n’épousera pas Suzanne, jamais ! Il n’épousera personne. Je serais trop malheureuse… Et tout d’un coup je me suis mise à le haïr affreusement.

« Alors, sais-tu ce que j’ai fait ?… écoute. J’avais vu le jardinier préparer des boulettes pour tuer des chiens errants. Il écrasait une bouteille avec une pierre et mettait le verre pilé dans une boulette de viande.

« J’ai pris chez maman une petite bouteille de pharmacien, je l’ai broyée avec un marteau, et j’ai caché le verre dans ma poche. C’était une poudre brillante… Le lendemain, comme tu venais de faire les petits gâteaux, je les ai fendus avec un couteau et j’ai mis le verre dedans… Il en a mangé trois… moi aussi, j’en ai mangé un… J’ai jeté