Page:Maupassant - Histoire corse (extrait de Gil Blas, édition du 1881-12-01).djvu/12

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langage, charabia corse, patois graillonnant, bouillie de français et d’italien, il m’exprimait son plaisir à me recevoir, quand une voix claire l’interrompit et une petite femme brune, avec de grands yeux noirs, une peau chaude de soleil, une taille mince, des dents toujours dehors dans un rire continu, s’élança, me secoua la main : « Bonjour, Monsieur ! ça va bien ? » enleva mon chapeau, mon sac de voyage, rangea tout avec un seul bras, car elle portait l’autre en écharpe, puis nous fit sortir vivement en disant à son mari : « Va promener Monsieur jusqu’au dîner. »

M. Calabretti se mit à marcher à mon côté, traînant ses pas et ses paroles, toussant fréquemment et répétant à chaque quinte : « C’est l’air du val, qui est fraîche, qui m’est tombé sur la poitrine. »

Il me guida par un sentier perdu sous des châtaigniers immenses. Soudain, il s’arrêta, et, de son accent monotone : « C’est ici que mon cousin Jean Rinaldi fut tué par Mathieu Lori. Tenez, j’étais là,