Page:Maupassant - La Maison Tellier.djvu/123

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se peigner, très anxieuse de savoir si ce n’était pas aujourd’hui qu’on s’en apercevrait.

Et, pendant le jour, elle interrompait à tout instant son travail, pour considérer du haut en bas si l’ampleur de son ventre ne soulevait pas trop son tablier.

Les mois passaient. Elle ne parlait presque plus et, quand on lui demandait quelque chose, ne comprenait pas, effarée, l’œil hébété, les mains tremblantes ; ce qui faisait dire à son maître :

— Ma pauvre fille, que t’es sotte depuis quelque temps !

À l’église, elle se cachait derrière un pilier, et n’osait plus aller à confesse, redoutant beaucoup la rencontre du curé, à qui elle prêtait un pouvoir surhumain lui permettant de lire dans les consciences.

À table, les regards de ses camarades la faisaient maintenant défaillir d’angoisse, et elle s’imaginait toujours être découverte par le vacher, un petit gars précoce et sournois dont l’œil luisant ne la quittait pas.