Page:Maupassant - La Maison Tellier.djvu/317

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sait ? Voulut-il mourir ? Il était fou. Il se retourna cependant vers l’île, vers Elle ; et, dans l’air calme de la nuit où dansaient toujours les refrains affaiblis et obstinés du bastringue, il lança d’une voix désespérée, suraiguë, surhumaine, un effroyable cri : — « Madeleine ! »

Son appel déchirant traversa le large silence du ciel, courut par tout l’horizon.

Puis, d’un bond formidable, d’un bond de bête, il sauta dans la rivière. L’eau jaillit, se referma, et, de la place où il avait disparu, une succession de grands cercles partit, élargissant jusqu’à l’autre berge leurs ondulations brillantes.

Les deux femmes avaient entendu. Madeleine se dressa : — « C’est Paul. » — Un soupçon surgit en son âme. — « Il s’est noyé », dit-elle. Et elle s’élança vers la rive ou la grosse Pauline la rejoignit.

Un lourd bachot monté par deux hommes tournait et retournait sur place. Un des bateliers ramait, l’autre enfonçait dans l’eau un grand bâton et semblait chercher quelque chose. Pauline cria : — « Que faites-vous ?