Page:Maupassant - La belle Ernestine (extrait de Gil Blas, édition du 1882-08-01).djvu/10

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pondait, enchantée : « À l’est partie, pou l’moment, mais a va rentrer. » Les gens attendaient avec patience, déjeunaient, attendaient encore, buvaient toujours, puis, las, enfin faisaient atteler ; et comme ils montaient en voiture, Ernestine, riant comme une folle, leur criait au nez : « Mais v’là six heures que vous me r’gardez, j’vous ai servi l’déjeuner et tout c’que vous avez voulu. C’est mai la belle Ernestine ! »

Et elle s’asseyait pour rire à son aise devant les voyageurs stupéfaits.

Elle est l’amie, je dis l’amie, de la moitié de ses clients, qu’elle séduit par sa grâce rustique et sa bonne humeur toute ronde.

L’an dernier, la reine d’Espagne vint la voir et fit annoncer sa visite. Tout le monde, hormis Ernestine, perdit la tête dans la maison. On rêvait de plats extraordinaires pour ce royal déjeuner. Un