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L’ORDONNANCE

Le cimetière plein d’officiers avait l’air d’un champ fleuri. Les képis et les culottes rouges, les galons et les boutons d’or, les sabres, les aiguillettes de l’état-major, les brandebourgs des chasseurs et des hussards passaient au milieu des tombes dont les croix blanches ou noires ouvraient leurs bras lamentables, leurs bras de fer, de marbre ou de bois sur le peuple disparu des morts.

On venait d’enterrer la femme du colonel de Limousin. Elle s’était noyée deux jours auparavant, en prenant un bain.

C’était fini, le clergé était parti, mais le colonel, soutenu par deux officiers, restait debout devant le trou au fond duquel il voyait encore le coffre de bois qui cachait, décomposé déjà, le corps de sa jeune femme.