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le lapin

troupeaux, nuit et jour, à travers les plaines.

Et le brigadier ajouta :

— V’là trois s’maines que Polyte couche avec elle, vu qu’il n’a pas d’abri, ce maraudeur.

Le gendarme se permit un mot :

— Il prend la couverture au berger.

Madame Lecacheur, saisie d’une rage nouvelle, d’une rage accrue par une colère de femme mariée contre le dévergondage, s’écria :

— C’est elle, j’en suis sûre. Allez-y. Ah ! les bougres de voleux !

Mais le brigadier ne s’émut pas :

— Minute, dit-il. Attendons midi, vu qu’il y vient dîner chaque jour. Je les pincerai le nez dessus.

Et le gendarme souriait, séduit par l’idée de son chef ; et Lecacheur aussi souriait maintenant, car l’aventure du berger lui semblait comique, les maris trompés étant toujours plaisants.

Midi venait de sonner, quand le brigadier Sénateur, suivi de son homme, frappa trois coups légers à la porte d’une petite maison isolée, plantée au coin d’un bois, à cinq cents mètres du village.