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hautot père et fils

tant d’argent. C’était trop, beaucoup trop. Elle gagnait assez pour vivre, elle, mais elle désirait seulement qu’Émile trouvât quelques sous devant lui quand il serait grand. César tint bon, et ajouta même un cadeau de mille francs pour elle, pour son deuil.

Comme il avait pris son café, elle demanda :

— Vous fumez ?

— Oui… J’ai ma pipe.

Il tâta sa poche. Nom d’un nom, il l’avait oubliée ! Il allait se désoler quand elle lui offrit une pipe du père, enfermée dans une armoire. Il accepta, la prit, la reconnut, la flaira, proclama sa qualité avec une émotion dans la voix, l’emplit de tabac et l’alluma. Puis il mit Émile à cheval sur sa jambe et le fit jouer au cavalier pendant qu’elle desservait la table et enfermait, dans le bas du buffet, la vaisselle sale pour la laver, quand il serait sorti.

Vers trois heures, il se leva à regret, tout ennuyé à l’idée de partir.

— Eh bien ! mam’zelle Donet, dit-il, je vous souhaite le bonsoir et charmé de vous avoir trouvée comme ça.