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tête, malgré lui, un « oui » qui révélait sa joie et qu’Andermatt observait sans paraître le regarder.

Colosse demeurait impassible, mais aussi content que son père.

Alors Andermatt dit au notaire :

— Veuillez lire l’acte pour la constitution de la Société, maître Alain.

Et il s’assit.

Le notaire dit à son clerc : « Allez, Marinet. »

Marinet, un pauvre étique, toussota, et avec des intonations de prédicateur et des intentions déclamatoires, il commença à énumérer les statuts relatifs à la constitution d’une société anonyme, dite Société de l’Établissement thermal du Mont-Oriol, à Enval, au capital de deux millions.

Le père Oriol l’interrompit :

— Moment, moment, dit-il. Et il tira de sa poche un cahier de papier graisseux, traîné depuis huit jours chez tous les notaires et tous les hommes d’affaires du département. C’était la copie des statuts que son fils et lui, d’ailleurs, commençaient à savoir par cœur.

Puis il appliqua lentement ses lunettes sur son nez, redressa sa tête, chercha le point juste où il distinguait bien les lettres, et il ordonna :

— Vas-y, Marinet.

Colosse, ayant rapproché sa chaise, suivait aussi sur le papier du père.

Et Marinet recommença. Alors le vieux Oriol, dérouté par la double besogne d’écouter et de lire en même temps, torturé par la crainte d’un mot changé, obsédé aussi par le désir de voir si Andermatt ne faisait point quelque signe au notaire, ne laissa plus passer