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Alors le silence du bois fut si profond qu’il devenait pour eux pénible comme une souffrance. On n’entendait rien que l’eau courant dans les pierres, un peu plus bas, puis, ces imperceptibles frissons de bêtes menues qui passent, ces rumeurs insaisissables de mouches qui volent ou de gros insectes noirs faisant basculer des feuilles mortes.

Où étaient donc Louise et Gontran ? Que faisaient-ils ? Tout à coup on les entendit, très loin ; ils revenaient. Mme Honorat se réveilla et fut surprise :

— Tiens, vous êtes ici ! Je ne vous ai pas senti approcher !… Et les autres, vous les avez trouvés ?

Paul répondit ;

— Les voici. Ils arrivent.

On reconnaissait les rires de Gontran. Ce rire soulagea Charlotte d’un poids accablant qui pesait sur son esprit. Elle n’eût pas su dire pourquoi.

On les aperçut bientôt. Gontran courait presque, entraînant par le bras la jeune fille toute rouge. Et avant même d’être arrivé, tant il avait hâte de conter son histoire :

— Vous ne savez pas qui nous avons surpris ?… Je vous le donne en mille… Le beau docteur Mazelli avec la fille de l’illustre professeur Cloche, comme dirait Will, la jolie veuve aux cheveux roux… Oh ! mais là… surpris… vous entendez… surpris… Il l’embrassait, le gredin… Oh ! mais !… Oh ! mais !…

Mme Honorat, devant cette gaîté immodérée, eut un mouvement de dignité :

— Oh monsieur le comte… pensez à ces demoiselles !…

Gontran s’inclina profondément.